Phobie scolaire

C'est quoi ? 

C'est la peur irrationnelle (sans motif connu) de se rendre à l'école. 

La principale définition utilisée est celle du Dr Ajuriaguerra, neuropsychiatre : "Il s'agit de jeunes qui, pour des raisons irrationnelles, refusent de se rendre à l'école et résistent avec des réactions d'anxiété très vives ou d'angoisses si on les force à y aller".

Ce sont des jeunes à qui l'envie d'apprendre ne manque pas. Cette peur se caractérise par une angoisse massive et incontrôlable, qui augmente à l'idée de devoir se rendre dans leur établissement ou dans l'environnement scolaire.
Il en résulte une incapacité physique et psychique de se déplacer et de suivre les cours. Cependant, cette peur incontrôlable peut n'avoir aucun lien avec l'école elle-même.

 

La phobie scolaire est à différencier du décrochage scolaire. Dans ce cas, on peut tout à fait se déplacer vers son établissement même si il y a une certain mal-être ou un désintérêt pour l'école.

 

Cette terminologie de "phobie scolaire" a le mérite d'être parlante mais n'est pas tout à fait exacte. En effet, il ne s'agit pas réellement de phobie et il ne s'agit pas forcément de l'école.

Alors, Késako ?

Tout d'abord, la phobie scolaire est liée à l'école en tant que lieu de vie, il peut s'agir de la peur d'un professeur, de difficultés relationnelles avec les camarades de classe...

Ensuite, ce n'est pas phobique à proprement parler. On peut avoir la phobie des araignées, de l’ascenseur, mais dans le cas de phobie scolaire, plusieurs composantes entrent en jeu et ce n'est pas si simple que cela.

 

On parle aussi de "refus scolaire anxieux", mais cela n'est pas tout à fait pertinent non plus puisque l'enfant ne refuse pas de se rendre à l'école, il ne PEUT pas.

On définit le refus scolaire anxieux comme étant une difficulté majeure à aller à l'école observée chez les enfants et les adolescents, associée à une détresse émotionnelle le plus souvent en rapport avec l'anxiété et/ou de la tristesse      ( King et Bernstein, 2001).

 

Quel terme utiliser alors ? Vaste question sur laquelle beaucoup se penchent mais aucun sigle pertinent n'est encore apparu — au même titre que le terme de "surdoués, précoces" a fait débat pour parler de cette population au fonctionnement différent, pour donner naissance à celui de "Haut potentiel intellectuel", moins controversé et plus juste.

Toujours est-il que même si c'est un mal encore peu connu, voici ce que nous pouvons en dire aujourd'hui :

 

Comment ça arrive ?

La phobie scolaire peut s'installer progressivement, pour des raisons difficiles à identifier ( pression scolaire, sentiment d'isolement, mal-être diffus...), soit brutalement, suite à un événement traumatisant qui s'est produit à l'école (violences de la part d'élèves, pression d'un prof, échec...) ou qui a eu lieu en dehors de l'école (décès, divorce des parents, problèmes familiaux...).

La phobie scolaire n'a donc pas d'explication univoque et les raisons peuvent être multiples. Il y a autant de raisons à ce mal-être qu'il y a d'enfants concernés puisque les causes sont tant environnementales qu'individuelles.

 

La phobie scolaire n'existe pas dans la nomenclature psychiatrique (DSM V). La terminologie utilisée consiste en une décomposition entre anxiété de séparation, phobie sociale, stress post-traumatique.*

( cf: association phobie scolaire.)

 

Il est donc difficile de décrire une situation type de la phobie scolaire, toute la difficulté réside justement là pour l'enfant concerné et sa famille : prendre le temps d'écouter pour déterminer ce qui a causé cette peur panique de se rendre à l'école est déterminant pour la prise en charge.

Est-ce du harcèlement ? De la précocité ? Des troubles de l'apprentissage ? Un stress dans la sphère familiale ?...

En quelques chiffres...

Il n'existe pas beaucoup d'études à ce sujet mais nous pouvons dire que dans les pays occidentaux, 1 à 5% des enfants scolarisés sont touchés par la phobie scolaire. Elle touche les bons élèves comme les moins bons, toutes  catégories socioculturelles confondues. Ce chiffre est en constante augmentation. 

Elle représente 5 % des motifs de consultation en pédopsychiatrie.

Chez les jeunes HPI :

On estime, d'après le rapport Delaubier de 2002, qu'un tiers des enfants HPI présenterait des difficultés scolaires et / ou psychologiques (en France, 2 à 3 % des enfants scolarisés de 6 à 16 ans sont HPI).

Quels en sont les signes ?

La phobie scolaire se traduit par la peur intense à l'idée de retourner à l'école. Cela terrifie l'enfant ou l'ado : crises d'angoisse, attaques de panique, crises de larmes, décharge émotionnelle (colères vives). 

Les signes sont souvent des maux de ventre, nausées, maux de tête, sueurs froides, cœur qui bat vite, problème de sommeil...

 

Le signe le plus marquant est celui des maux de ventre et des problèmes d'endormissement le dimanche soir. Pourtant, ils ont envie d'y aller à l'école, mais c'est plus fort qu'eux, ils ne peuvent pas.

Ils ressentent une angoisse croissante au moment de se rendre à l'école et peuvent aller jusqu'à refuser de quitter la maison.

Lorsque la phobie s'installe de manière insidieuse, c'est l'absentéisme qui va être un signe déclencheur. L'enfant arrive en retard, ou prétexte des maux de ventre pour rester à la maison une journée par-ci par-là, ou se rend souvent à l'infirmerie.

 

Ces manifestations disparaissent les weekends et pendant les vacances, mais réapparaissent les veilles de rentrée.

 

Les absences à répétition poussent le jeune à se sentir incapable de retourner à l'école. Se lever le matin devient de plus en plus compliqué , il s'isole, refuse même de se rendre à ses activités extra-scolaires.

Ce comportement est le signe d'une véritable souffrance physique et psychique, qui finit par toucher toute la sphère familiale. 

 

En somme, tous les signes de malaise du jeune sont à prendre en compte sans délai pour une prise en charge rapide (anorexie, scarification, maux de ventre, isolement, pb de sommeil...).

 

Sans prise en charge adaptée, la phobie scolaire peut évoluer vers une rupture sociale.

Cette rupture est lourde de conséquences pour le jeune en souffrance : isolement social et affectif, dépression, abandon des études...

 

Chez les HPI...

"Les enfants précoces ne sont pas tout à fait comme les autres, mais comme les autres se sont des enfants" dixit le Dr Olivier REVOL ( pédopsychiatre spécialisé dans l'accompagnement des HPI).

 

Même si, dans le cas d'enfants à haut potentiel, tous les facteurs cités plus haut sont des causes possibles de développer une phobie scolaire, il est important de prendre en compte d'autres éléments en ce qui les concerne.

En effet, cette population est plus sujette que les autres à la dépression et à d'autres syndromes majeurs tels que les comportements suicidaires.

 

Les causes ?

  • Le sentiment d'isolement généré par l'incompréhension des enseignants, des camarades de classe... ils ont des questionnements profonds sur la vie et la mort, sont capables de mettre en évidence les incohérences et les injustices du monde. Il est difficile pour eux de se sentir écoutés et compris par leur entourage. C'est pourquoi le sentiment de décalage entre ces enfants et leurs pairs devient pesant. Il existe aussi un décalage dans les centres d'intérêts : difficile dans ces conditions de partager quoi que ce soit  avec les copains quand ceux-ci se passionnent pour le foot alors que lui connait tout sur les minéraux (par exemple).
  • L'ennui et la différence de pensée. Leur pensée en arborescence leur permet de créer des liens entre des éléments d'apparence épars et de proposer des raisonnements qu'ils sont ensuite incapables d'expliquer (en cause : la vitesse neuronale supérieure à la moyenne). Difficile de suivre les cours dans un système éducatif individualiste et cloisonné quand notre pensée tourne à plein régime et que l'on n'est pas "nourri" intellectuellement ou que l'enseignement manque de sens.
    N.B. Cet ennui peut suffire à développer une forte dépression chez les HPI.
  • L'hyperesthésie. Cette exacerbation des sens est source d'angoisse et d'anxiété profondes chez les HPI. Cette sensation de n'avoir jamais l'esprit au repos, cette incapacité à faire le tri entre toutes les informations qu'ils perçoivent est tout simplement épuisante. Il en résulte une grande difficulté à se concentrer sur l'essentiel ;  l'esprit est totalement accaparé par les odeurs, les sons, la lumière etc. Très doués pour détecter les signaux faibles, les HPI sont en hyper-vigilance permanente. Difficile de suivre un cours sereinement quand le cerveau bouillonne. Dans certains cas, toute l'énergie peut être consacrée à la gestion de ces signaux et il ne reste plus de place pour les apprentissages. Il peut donc en résulter une chute des résultats scolaires qui viendra accroître l'angoisse du jeune.
  • Les troubles Dys. Même si ces troubles ne touchent pas que des HPI, ils y sont souvent associés. Dans ces situations, le jeune est face à des difficultés supplémentaires dans ses apprentissages puisqu’il doit fournir plus d'efforts que les autres pour réussir. Ces efforts sont épuisants, pour un résultat souvent médiocre. Passer des heures à faire ses devoirs dans un état de fatigue intense, après une journée d'école déjà éprouvante, est une grande source d'angoisse et de découragement. Sans une prise en charge adaptée, l'enfant peut finir par avoir peur de ce que l'école représente pour lui : une source d'angoisse. 

Cette liste n'est pas exhaustive, mais voici, en quelques mots, les maux dont souffrent le plus souvent les enfants HPI. 

L'école est le révélateur d'une anxiété qui peut devenir envahissante et mener au refus scolaire. Dès que les premiers signes apparaissent, faites-vous aider.

 

On fait quoi ?

 La phobie scolaire est une véritable souffrance psychologique. C'est pour cette raison qu'il est très important de mettre en place un accompagnement adapté dès les premiers signes.

Psychologue, psychotérapeute (thérapie cognitico-comportementale), thérapie familiale... une personne en qui l'enfant aura confiance et qui pourra l'aider à identifier les causes de sa phobie, à gérer son angoisse face à l'impossibilité d'aller en cours.

Maintenir le lien avec les apprentissages est très important afin de leur permettre de ne pas rester isolé, de continuer leur scolarité et de grandir, tout simplement.

Il est important également de garder des relations avec le corps enseignant.

Lorsque l'enfant se sent écouté et compris, qu'il voit qu'il existe un dialogue entre ses parents et l'école, cela peut déjà faire descendre le niveau d'anxiété.

En résumé, lorsqu'un travail de concert est instauré entre toutes les personnes en relation avec l'enfant, les choses bougent plus vite.

Voir aussi : Accompagnement Ados

Isabelle Coisy